Bio-impacteur et prélèvement d’air en continu : comprendre les exigences de l’Annexe 1 des GMP

Depuis la sortie de l’annexe 1 des GMP, nous entendons régulièrement que les prélèvement des particules viables avec bio-impacteur doivent être effectués en continue pendant toute la durée de la production. Plusieurs fournisseurs de biocollecteur proposent même des appareils permettant de collecter à des débits moindres (20 l/min) sur de plus longues périodes

Nous avons donc contacté des experts pour comprendre leur interprétation de l’annexe 1 sur ce sujet :

Voici les avis de :

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Ségolène Charrat consultante experte microbiologie chez Cophaclean

Précisons que ces exigences relatives aux prélèvements en continue s’applique en zone de classe A.

Le paragraphe 9.24 précise également que cette exigence doit être envisagée (donc non obligatoire mais à justifier) pour les zones de classe B notamment les plus critiques pour le process. Attention néanmoins il n’est pas précisé si la surveillance de l’air doit être réalisée avec bio-impacteur c’est-à-dire un prélèvement d’air actif par aérobiocollection ou par sédimentation. Les deux sont mêmes possibles.

A mon sens il n’est pas forcément pertinent d’introduire un préleveur d’air pendant des phases critiques ou de réaliser un prélèvement qui risque de perturber le flux laminaire mis en place dans les environnements de classe A. Le prélèvement par bio collecteur est intéressant pour les phases d’assemblage, avant et après réalisation des opérations critiques pour évaluer la qualité globale du volume d’air prélevé.

Mais au regard de la laminarité mise en place dans un environnement de classe A il me parait plus pertinent de prévoir des prélèvements d’air passif avec des boites exposées à des endroits stratégiques et choisis pour leur criticité au travers d’une analyse de risque pertinente. Attention toutefois à prévoir des changements de boites assez réguliers pour éviter la dessiccation du milieu.

Pour les industriels qui souhaiteraient mettre en place des prélèvements par bio collecteur il faudra choisir les points de sorte qu’ils apportent une information pertinente pour le process, ce qui est l’exigence formulée dans l’Annexe, mais sans faire prendre de risque au procédé, autre exigence formulée dans le texte.

Dans l’idée de ce dernier point il est donc intéressant de pouvoir envisager des débits de prélèvement moindres pour impacter au minimum la laminarité de l’air délivré dans la zone ou dans l’enceinte de production. Néanmoins attention à toujours valider avec le débit réduit, le temps de prélèvement maximal pour éviter la dessiccation de la gélose.

Sabine Bessières Recasens marketing manager BioMonitoring chez Merck

Je suis plutôt alignée avec les commentaires de Ségolène Charrat . 

Mon interprétation de la partie 9.22 de la nouvelle Annexe 1 des GMP EU Pharma est la suivante : dans les environnements de production aseptiques, la surveillance doit être « fréquente » avec les méthodes reconnues et/ou validées par rapport à ces méthodes : boîtes de sédimentation pour les prélèvements d’air passifs, prélèvements actifs volumétriques  avec des bio collecteurs , tests du  personnel,  gants, tenues  ou des surfaces avec par exemple des boites contact . C’est la combinaison de tous ces prélèvements continuellement qui permettront de tracker d’éventuels évènements pouvant générer une contamination par un germe en suspension. 

Le dernier rapport technique 13 de 2022 sur la surveillance environnementale de l’association PDA -Parenteral Drug Association donne une définition plutôt claire  de ce que doit être la surveillance de l’air . La surveillance doit permettre de déterminer s’il y a des particules viables et/ou un taux de particules total en suspension dans l’air à des endroits qui leur permettraient  de se déposer sur les surfaces en contact avec le produit et de se retrouver ainsi dans les étapes du procédé ou dans le produit final .  J’aime bien cette définition car finalement c’est ce qui nous importe. 

Dans la partie 9.24 de l’annexe 1 ici en question, comme indiqué par Ségolène Charrat il est recommandé une surveillance des « viables » dans l’air en Grade A (par exemple par prélèvement d’air actif ou sédimentation) pendant la durée du procédé critique, y compris l’installation ou l’assemblage des équipements de process aseptique et opération de remplissage.  Il est aussi indiqué que cette surveillance devrait permettre de tracker toute intervention ou évènement transitoire et anomalie du système en évitant tout risque de contamination  induite par  du  prélèvement lui-même . 

Toujours dans un autre rapport de la PDA (TR 13-2) on peut aussi trouver une définition de la surveillance « continue » dans le glossaire. : Il s’agit d’une surveillance liée au lot, définie par un dossier de lot approuvé, pour s’assurer qu’un état de contrôle est maintenu pendant le process et que tout événement aberrant est détecté. La fréquence de la surveillance étant déterminée par une évaluation des risques. Dans ce même rapport les limites ou niveaux de contamination microbiologique sont donnés comme dans le tableau 6 de la partie 9 de la nouvelle Annex des GMP en unités par m3 d’air prélevé.

Je m’interroge donc : La prolongation de temps de prélèvements actifs en réduisant les débit s ou en séquentiel d’un même volume d’air (les deux donnent un résultat unique) vont-elles permettre de détecter tout évènement aberrant à un temps T comme requis ?  Même dans ce type d’approche un pourcentage de moins de 1 % voire 0,1% du volume d’air total de la salle propre est seulement prélevé (dépendant  de la taille de la salle et de son renouvellement d’air) 

Des prélèvements d’air actifs rapides, flexibles et fiables à la bonne fréquence et aux bons endroits permettent aussi je pense de prélever aux moments les plus à risque in process lorsque cela est possible. Ces prélèvements peuvent être représentatifs à un temps T défini, être significatif, on peut adapter leur fréquence   et le plan d’échantillonnage facilement si nécessaire. Il faut bien sûr s’assurer de ne pas perturber le flux d’air de  la salle  aux endroits et moments critiques  afin de maintenir le contrôle continu  de sa  propreté  Cela devrait être possible  en combinant toutes les méthodes de surveillance appropriées dont les prélèvements d’air passifs par  boîtes de sédimentation.  

Il y a des points intéressants dans le dernier rapport TR13 de 2022 de la PDA sur la surveillance environnementale des procédés aseptiques comme : 

« Les méthodes de prélèvement d’air actives et passives peuvent être utilisées ensemble pour acquérir des connaissances et une compréhension des changements et des tendances dans l’environnement des salles propres »

« … Un avantage additionnel d’un prélèvement passif additionnel est qu’il imite la voie potentielle de contamination vers un processus critique »

Si l’on considère la qualification des biocollecteurs décrite dans la norme EN 17141 dont j’ai été un des experts pour l’AFNOR, l’efficacité de collecte physique des biocollecteurs doit permettre une récupération d’au moins 50% des particules de petites tailles d’au moins 2µm. Est-ce que cette efficacité est toujours atteinte lors de prélèvements actifs longs à de faibles débits ? Qu’en est-il du dessèchement éventuel des géloses lors de prélèvements d’air étendus quel qu’ils soient ? Le dessèchement impacte-t-il la fertilité dans ce cas et qu’en est de la fiabilité des résultats de prélèvement ? 

Un résultat unique obtenu avec un biocollecteur en 30 minute est-il plus fiable, précis qualitatif qu’un prélèvement obtenu en 10 mn si l’efficacité de collecte n’est pas aussi bonne. Dans les deux cas un seul résultat obtenu. Qu’est ce qui est important ? N’est-il pas important de se rapprocher le plus d’un résultat fiable à un temps T défini comme critique lors de l’analyse de risque ? 

Alexis Billard Microbiology QC manager chez Bracco

Si la nouvelle Annexe 1 des BPF agite notre quotidien de microbiologiste depuis quelques temps déjà, les précisions données dans le paragraphe 9.24 sur le suivi des particules viables de l’air en continu qui devrait être mise en place sur les phases critiques en classe A et envisagé en classe B n’est finalement pas une révolution en soit.

En effet, dans la plupart des industries, les analyses de risques sur ces activités incluent déjà un monitoring viable en continu, principalement par des sédimentations avec en plus des phases de prélèvement d’air dynamique par des systèmes intégrés, effectuées épisodiquement avant ou lors des activités.

La question soulevée ici est : pourquoi ne pas envisager des prélèvements d’air actif continus sur l’ensemble des activités à la place ou en plus des sédimentations classiques ?

En effet, est-ce là l’étape suivante à franchir en termes de consolidation de la maîtrise du risque aseptique ?

Ma réponse est : … oui et non, enfin pourquoi pas, ça dépend…

Les activités critiques se doivent d’être réalisées sous un flux A exempt de contamination ; Mais que mesurent exactement les méthodes de prélèvement viables disponibles ?

Une gélose de sédimentation de 90 mm sous un flux laminaire puissant va capter les particules de façon gravitaire dans un environnement d’activité identifié comme critique, mais relativement restreint.

La question que l’on peut se poser est : est-ce qu’une surface de gélose de 64 cm2 est suffisante pour s’assurer de l’asepsie d’une ligne de remplissage de plusieurs mètres ?

Par exemple, même avec une absence d’entrée d’air B vers A démontrée, une sédimentation à elle seule est-elle suffisante pour mettre en évidence une entrée de viables après ouverture d’une porte sur un RABS lors d’une intervention même mineure ? Ceci reste bien évidemment à l’appréciation de chacun et des pratiques couramment admises de monitoring.

Une mesure d’air active à bas débit permet de capter un volume d’air plus important et de limiter l’impact sur les flux environnants. Il me paraît peu pertinent par exemple de conjuguer en parallèle sédimentations et airs actifs en continu sur l’ensemble des activités dans un isolateur, du montage à fin bouchonnage.

Mais je pense que ces systèmes peuvent être une façon de repenser les monitorings d’activités critiques, par exemple pour monitorer spécifiquement en continu des interventions en classe A et B environnant ou des phases jugées plus critiques et ceci, en plus de ce qu’apportent les sédimentations déjà en place.

Pour finir, si une réticence naturelle peut survenir lorsqu’il s’agit d’augmenter le nombre de prélèvements sur des zones A et B, n’oublions pas que ces mêmes prélèvements sont bien utiles lorsque des évaluations d’impacts et investigations se présentent….

A suivre…. D’autres réponses « d’expert.e.s microbio » sont en cours de rédaction !

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2 réponses
  1. Thibaudon Michel
    Thibaudon Michel dit :

    Bonjour à tous
    tant la lecture de certains points de l’annexe 1 que certains commentaires de ce blog me laissent rêveur!
    comment pouvez vous parler de particules viables en décrivant des méthodes par culture. Vous ne récupérez qu’une partie des particules viables: celles qui sont cultivables selon les conditions de culture utilisées, et selon les types de microorganisme le pourcentage est plutôt faible. On a eu du mal à faire passer ce message dans la 17141, dommage de l’oublier même si cela arrange certains.
    bonne journée

    Répondre
    • pierre
      pierre dit :

      Bonjour Michel et merci pour ce commentaire.
      Effectivement, la détection de microorganismes avec des méthodes de croissance (milieux de culture) implique qu’on fasse des compromis. Quelles alternatives (performantes) proposez-vous ?

      Répondre

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