Microbiologie pharmaceutique : Guide d’achat des milieux de culture pour les contrôles environnementaux
Choisir un fournisseur de milieux de culture pour les contrôles environnementaux dans le domaine pharmaceutique n’est vraiment pas une étape à prendre à la légère. Un mauvais choix peut s’avérer particulièrement pénalisant pour le laboratoire, mais aussi pour la production.
Pour vous aider à faire le bon choix, nous avons répertorié dans cet article, les points critiques à vérifier avant de choisir un nouveau fournisseur de milieux de culture.
Sommaire :
- Quelles sont les milieux de culture utilisés pour les contrôles environnementaux ?
- Comment choisir un milieu de culture performant ?
- Les critères de choix pour la boite de Petri
- La logistique des milieux de culture
- Les compétences spécifiques du fournisseur
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Nous avons sondé les SuperMicrobiologistes.
Voici leurs marques préférées de milieux de culture pour contrôles environnementaux.
Quelles sont les milieux de culture utilisés pour les contrôles environnementaux ?
Les contrôles environnementaux effectués dans l’industrie pharmaceutique se font avec des milieux de cultures spécifiques. On retrouve des boites contact (ou Rodac, ou 55mm) pour le contrôle des surfaces, et des boites de sédimentation (ou 90mm) pour les contrôles actifs ou passifs des contaminations de l’air.
Les compositions de base des géloses sont le TSA (Tryptic Soy Agar) et le SDA (Sabouraud Dextrose Agar). Pour les contrôles environnementaux ces milieux sont très souvent complémentés avec des neutralisants. La fonction des neutralisant est de neutraliser les résidus de désinfectant qui pourraient inhiber la croissance des microorganismes (LTHT, β-lactamases ou autres).
Si les milieux sont destinés à être utilisés dans un isolateur ou dans une zone stérile critique (industrie pharmaceutique stérile), alors ils sont conditionnés sous triple emballage et irradiés. Pour les environnements moins critiques (industrie pharmaceutique non stérile) les milieux sont disponibles en simple emballage.
1 – Comment choisir un milieu de culture performant ?
Ici, nous allons parler de ce qu’il y a dans nos boîtes de Petri; Le milieu de culture en agar.
Les performances techniques de la gélose
Non, un TSA ne vaut pas forcément un autre TSA… Vous aurez beau suivre la même recette qu’un cuisinier étoilé, on doute que votre plat soit aussi bon ! Pour les milieux de culture c’est la même chose. La composition peut être la même, chaque fournisseur suit sa propre recette avec ses petits secrets.
De plus, le choix des matière première peut énormément faire varier les performances de la gélose.
Demandez à votre fournisseur comment il vérifie les performances de son milieu de culture. Est-ce qu’il teste d’autres souches que celles de la pharmacopée ? Quels sont ses critères de performance pour les matières premières ?
Certains fournisseurs testent la performance microbiologique de leurs matières premières avec des dizaines de souches. Si la croissance des souches n’est pas bonne, ils rejettent le lot de matière première.
Notre conseil :Testez plusieurs lots, avec les souches de la pharmacopée mais aussi avec vos souches environnementales. Questionnez/auditez le fournisseur sur ses tests internes.
L’efficacité des neutralisants
Ce point-là est extrêmement important et pourtant il semble trop souvent négligé par les laboratoire de microbiologie.
La formulation des désinfectants a beaucoup évolué ces dernières années. Il faut donc vérifier que les milieux de culture sont capables de correctement neutraliser les résidus pouvant être présents dans l’air ou les surfaces. Un défaut de neutralisation peut amener à la non-croissance d’une contamination et donc à un… faux négatif. Et nous les microbiologistes, les faux négatifs, ça nous donne des boutons !
Il faut donc vérifier la performance des neutralisants par rapport à la composition des désinfectants utilisés dans les zones de prélèvement.
Pour creuser le sujet, voici un article intéressant : Un mauvais choix de neutralisants va augmenter les risque de faux négatif
Problématique d’humidité dans la boîte de Petri
Cette humidité provient de molécules d’eau (jusque-là rien de nouveau) relarguées par la gélose.
Ce phénomène à lieu:
- Soit lors de la production. Le couvercle de la boîte de Petri étant refermé alors que la gélose est encore chaude (et relargue de la vapeur).
- Soit à cause de chocs de température lors du stockage du milieux culture (la gélose va relarguer de l’eau qu’elle ne va pas réabsorber.
Cette humidité peut avoir des répercussions sur :
- La fertilité du milieu de culture
- La stérilité : les gouttes d’eau créent un pont entre l’intérieur et l’extérieur de la boîte pouvant faire passer des contaminations de l’extérieur vers la gélose (exemple : contamination dans l’air ambiant de l’incubateur vers l’intérieur de la boîte).
Pour diminuer ce problème, certains fournisseurs ajoutent un dessiccant dans le sachet de boîtes.
Problématique de dessèchement de gélose
Lors des contrôles environnementaux par sédimentation, les géloses peuvent perdre beaucoup d’eau, surtout si ces contrôles ont lieu sous des flux. Sous ces contraintes les géloses vont se dessécher puis craquer ce qui rend le résultat impossible (ouverture d’une déviation).
Il faut donc privilégier des géloses avec un volume de remplissage le plus grand possible.
Notre conseil : Tester le « worst case » :
– X heures d’ouverture sous votre flux le plus puissant. (X = votre exposition la plus longue)
– Y heures d’incubation. (Y = votre incubation la plus longue)
Puis vérifier que la gélose n’a pas “craquer”. On peut même peser la gélose avant et après pour connaitre le volume d’eau perdue.
Et pour aller encore plus loin, on peut faire un test de fertilité avec une inoculation juste avant l’incubation.
Le CoA (Certificate of Analysis)
Vérifier que le Certificat d’Analyse comporte toutes les analyses dont vous avez besoin… c’est généralement le cas, mais on peut toujours avoir des surprises même avec les fournisseurs les plus connus !
2 – Les critères de choix pour la boite de Petri
Ici nous allons parler de la petite boite en plastique qu’est la boite de Petri
La solidité de la boîte de Petri
Tous les plastiques ne se valent pas.
Ils peuvent avoir différentes consistances, différentes épaisseurs, différents moules. Les boîtes vont être mises à rude épreuve entre les prélèvements et les incubations. Pour éviter de casser trop de boite, on privilégiera une boite solide.
Notre conseil : Manipulez les boîtes et faites les manipuler par les préleveurs.euses
La fermeture du couvercle de la boite de Petri
Pour aller de la zone de prélèvement vers la zone d’incubation, il vaut mieux privilégier des boîtes qui se ferment. Idéalement il faut que la fermeture soit facile et intuitive pour éviter les erreurs.
Certaines boites proposent une position pour les incubations sous condition anaérobie, à voir si cela est utile pour votre labo.
Notre conseil : Manipulez les boîtes et faites les manipuler par les préleveurs.euses
L’étiquetage de la boîte de Petri
Pour des questions de traçabilité, les boîtes de Petri sont étiquetées par le fournisseur. Pour ne pas interférer avec la lecture, une étiquette sur la tranche est un plus. Il faudra vérifier que les infos disponibles sur cette étiquette vous conviennent (code barre, nom, péremption, lot, numéro unique de la boite, etc…) et sont lisibles.
A noter qu’il existe plusieurs formats de code à barres. Le format GS1 permet aux lecteurs de tout de suite décoder les informations présentes dans le code (le lecteur extrait les informations et les ranges dans les bonnes colonnes). Pour les autres codes, il faudra “dire” au lecteur que telle information c’est la date de péremption et qu’elle va dans cette colonne, et ainsi de suite pour toutes les autres infos.
Le triple emballage et l’irradiation
En fonction de la criticité de la zone dans laquelle vous utilisez les géloses, les boîtes peuvent être simples ou triples emballées et irradiées.
L’irradiation ne va pas “stériliser la gélose”, mais va permettre de “stériliser” les emballages. Cette irradiation peut entraîner des conséquences sur la fertilité de la gélose. Généralement, pour ne pas perdre certaines propriétés, les géloses irradiées sont complémentées (c’est un des secrets de fabrication des fournisseurs).
Une gélose irradiée ne vaut donc pas forcément une gélose non irradiée.
Notre conseil : Il faut vérifier l’imperméabilité de l’emballage aux traitements de stérilisations que vous allez effectuer dans vos isolateurs de production. Mais aussi la facilité de manipulation de ces emballages (ouverture avec des gants d’isolateur).
Bonus : Compatibilité avec les incubateurs intelligents et les compteurs de colonies
Dans les prochaines années, on risque de voir débarquer de plus en plus d’incubateurs intelligents et des compteurs (ou trieurs). Ces incubateurs vont incuber les géloses et les lire régulièrement. Il faut donc que vos boîtes soient compatibles avec cette utilisation.
On peut vérifier que le format de la boîte est physiquement compatible, mais aussi que la lecture puisse se faire sur toute la surface de la boîte. Il peut y avoir des écritures ou des flèches incrustées dans le plastique, cela va forcément gêner la lecture. De plus, il peut y avoir des artefacts de lecture sur la périphérie de la boîte (effet halo).
3 – La logistique des milieux de culture
La température de stockage des géloses
A quelles températures doivent être stockées les géloses ? Au froid ou à température ambiante… et que veut dire ambiante ?
L’idéal pour le laboratoire de microbiologie est de pouvoir stocker un maximum de boîtes, cela limite les frais de livraisons, mais surtout cela permet de ne pas multiplier les tests à réception. Reste à savoir où vous avez le plus d’espace de stockage
L’autre avantage d’un stockage à température ambiante (ou plutôt contrôlée) : Si la gélose est contaminée, cela se voit tout de suite… ce qui n’est pas le cas pour un stockage au froid !
Dans tous les cas, on va éviter les chocs thermiques et essayer de garder une température constante entre la production chez le fournisseur et l’utilisation. Les variations de température vont créer des problèmes d’humidité dans la boîte de Petri.
Livraison mono lot des milieux de culture
Pour limiter les tests (fertilité et stérilité) à réception, il faut demander des livraisons mono lot au fournisseur.
Notre conseil : Demander à votre fournisseur s’il peut s’engager sur des livraisons mono-lot.
Péremption du milieu de culture
Il est toujours bon de connaître la péremption à fabrication, mais ce qui nous intéresse le plus, c’est la péremption minimale à réception.
Cette péremption doit couvrir tous nos besoins jusqu’à notre prochaine livraison. Une longue péremption permettra d’espacer les livraisons (à condition de pouvoir stocker) et donc de limiter le nombre de tests à réception.
La livraison des milieux de culture
Est-ce que les livraisons sont effectuées dans un camion qui contrôle et maîtrise la température du chargement ?
En hiver la température extérieure peut être négative et en été dans un camion on peut vite approcher les 50°C ! Il est donc impératif de pouvoir maîtriser la température pendant la livraison, mais aussi de pouvoir la contrôler. Certains fournisseurs proposent d’ajouter des trackers de température avec chaque livraison.
Le plus simple est d’établir un échéancier avec son fournisseur pour planifier les livraison sur un an. Mais en cas de problème, en combien de temps le fournisseur peut vous dépanner ? Cela peut sauver des situations
Notre conseil : Mettre en place un échéancier avec votre fournisseur pour planifier les livraisons sur 1 an.
Sur la même thématique : Comment choisir les températures d’incubation de vos milieux de culture ?
4 – Evaluer les compétences d’un fournisseur de milieux de culture
Cela vaut pour tous les consommables, mais encore plus pour les milieux de culture. En cas de problème c’est toute la production qui peut être paralysée.
La mauvaise nouvelle c’est que des problèmes de milieux de culture, vous en aurez… même si vous choisissez le “meilleur” des fournisseurs.
Le plus important c’est la façon dont votre fournisseur va adresser ce problème (fertilité, dessèchement, fertilité, boîtes cassées, etc…). Lorsque cela arrive vous avez besoin d’une réponse rapide de la part de votre fournisseur.
Pour les milieux de culture, c’est toujours bien d’avoir un fournisseur principal et un fournisseur back up… au cas où ! L’idéal est de commander chez les 2 fournisseurs, en faisant du 80-20% par exemple.
Notre conseil : Auditer le fournisseur et apprendre à connaître les interlocuteurs compétents techniquement. Il faut ensuite tester leur accessibilité. Avez-vous une adresse email directe, un numéro de téléphone ?
Mais surtout demandez à 2 ou 3 autres labos quelle est leur expérience avec le fournisseur… vous pouvez aussi lire notre article à ce sujet « Les milieux de culture préférés des SuperMicrobiologistes »
Vous avez maintenant toutes les cartes en main pour choisir le meilleur fournisseur de milieu de culture pour notre labo, à vous de jouer !
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