Microbiologie : Comment tester les dispositifs médicaux ?
Pour être tout à fait honnête, chez SuperMicrobiologistes nous avons plutôt une culture pharmacopée et alimentaire de la microbiologie. Alors quand on nous a parlé d’analyses microbiologiques des DM (Dispositifs Médicaux) nous étions un peu perdus.
Pour remédier à cela, nous sommes partis à la rencontre de SuperMicrobiologistes qui maîtrisent le sujet de la microbiologie dans le DM.
Voici leurs retours.
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Qu’est-ce qu’un Dispositif Médical ?
Commençant déjà par définir ce qu’est un DM… et comme vous le verrez ci-dessous, ce n’est pas si simple !
Un dispositif médical est un instrument, appareil, équipement, logiciel ou matériel (la liste est sacrément longue !) utilisé à des fins médicales pour diagnostiquer, prévenir, surveiller, traiter ou soulager des maladies.
Cela peut aller d’un pansement à un cœur artificiel, sans oublier les prothèses (hanche), les seringues d’acide hyaluronique, les ciments et les kits de dialyse.
Voyons maintenant les analyses microbiologiques effectuées sur ces dispositifs médicaux.
Qu’est-ce que l’audit de dose ?
Tous les microbiologistes travaillant dans les dispositifs médicaux le connaissent. L’audit de dose c’est LE test principal du DM…stérilisé par irradiation (Gamma, Béta, Rayon X).
Cet audit, effectué tous les 3, 6 ou 12 mois permet de vérifier l’efficacité continue de la stérilisation par irradiation.
Voici comment est réalisée l’audit de dose :
Tout d’abord on commence par une analyse de la biocharge du DM avant stérilisation. Cela permet de déterminer le nombre et la nature des contaminants microbiens.
Ces informations permettent ensuite de calculer une dose de radiation, appelée dose de vérification à laquelle les DM doivent être exposées. La dose de vérification est inférieure à la dose utilisée en routine.
Après l’irradiation à cette dose de vérification, des tests de stérilité sont effectués sur les DM pour s’assurer que la contamination initiale a correctement été éliminée.
En fonction des résultats, on obtient la dose d’irradiation minimale que devra recevoir le DM pour sa stérilisation de routine.
Ça va, vous suivez toujours ?
Attention les audits de dose ne concernent que le procédé de stérilisation gamma (irradiation).
L’analyse Bioburden sur Dispositif Médical
Pour les analyses de Bioburden sur les dispositifs médicaux, on suit la norme NF EN ISO 11737-1 (stérilisation des produits de santé – Méthodes microbiologiques).
Ces essais de biocharges sont réalisés quel que soit le type de stérilisation (oxyde d’éthylène, radiations, traitement à la chaleur).
Ils permettent de voir l’évolution de la contamination du DM au cours du temps et des productions.
Voici le protocole utilisé* :
- Le DM est immergé dans un liquide.
- Grâce à un traitement physique (agitation, bain ultrason, …) on récupère les microorganismes.
- On filtre ensuite le liquide et on incube les membranes sur différents types de gélose.
- La lecture des boîtes se fait après 3 à 7 jours d’incubation… comme pour un test de Bioburden pharma.
Ce test représente généralement 30 analyses (10 DM de 3 lots différents)
La validation des conditions du test de Biocharge d’un DM est très intéressante. On en a même écrit un article complet sur le sujet.
*Protocole utilisé dans la majorité des cas… mais il y a des cas particuliers :
Certains sont extrait par circulation d’éluant (kit de tubulure/poches par exemple). Le dispositif peut aussi être soluble. Certains ne sont pas immergeables car ils flottent.
Test de stérilité sur Dispositifs Médicaux
Comme pour l’analyse des bioburden, on ne suit pas les textes de la pharmacopée, mais d’une norme ISO, il s’agit de la NF EN ISO 11737-2 : test de stérilité
Le principe du test de stérilité est très proche de celui effectué par inclusion en industrie pharmaceutique.
Le DM est immergé dans un milieu de culture pendant 14 jours.
Au bout des 14 jours, s’il y a une observation d’une croissance microbienne (trouble, floculation, dépôt), c’est que le DM est contaminé. S’il n’y a pas de croissance microbienne, c’est que le DM n’est pas contaminé.
Contrairement à la pharma, dans les DM on utilise qu’un seul milieu de culture, le TSB. Le thioglycolate (pour l’analyse des microorganismes anaérobies), peut cependant également être utilisé si on retrouve des microorganismes anaérobies dans les analyses bioburden.
Dans le cadre de l’audit de dose, les tests de stérilité sont effectués sur 10 DM. Si maximum 1 test de stérilité sur 10 est positif, alors l’audit de dose est validé (On vous voit déjà sauter au plafond… mais on vous rappelle que lors de l’audit de dose, on travaille avec une dose de « vérification » et non avec une dose de routine). S’il y a plus d’1 test sur 10 qui est positif, alors là il y a investigation… et ça, ça ne sent pas bon du tout !
Les challenges des analyses microbiologiques d’un DM
L’analyse microbiologique des dispositifs médicaux est un véritable challenge.
Vous en doutez encore ?
Voici 2 exemples qui devraient vous faire changer d’avis.
Le choix des contenants
Ce qui rend compliqué l’analyse microbiologique des DM c’est qu’ils sont de nature, de forme et de taille très (très, très) différentes. Pour rappel, on peut avoir des pansements ou des prothèses de hanche de 40 cm.
Pour chaque DM, il faut donc adapter un protocole particulier, mais surtout trouver des contenants adaptés, et ça ce n’est pas une mince affaire !
Pour certains DM, il faut des contenants énormes. Cela peut aller jusqu’à des récipients souples remplis de 20 litres de milieu de culture. Qui veut manipuler ça dans son labo ?
Les problématiques “techniques”.
Lorsqu’on analyse un DM, il faut que toutes les parties intérieures (et extérieures) du DM soient en contact avec le milieu de culture ou le diluent.
Lorsque le DM contient des tuyaux (ex : perfusion) il faut donc que l’intérieur des tuyaux soit en contact avec le liquide.
Souvent la seule solution c’est de découper les tuyaux… et tout cela en conservant l’asepsie (sous un PSM ou pire sous un isolateur). Vous imaginez un peu le challenge ?
Analyser des DM demande donc de sacrés compétences, de l’expérience mais également de l’imagination (normalement ça ne manque pas chez les microbiologistes !).
C’est peut-être pour cela que la majorité des fabricants de DM n’a pas de laboratoire de microbiologie et préfère sous-traiter les analyses microbiologiques à des laboratoires prestataires spécialisés.
Analyses microbiologiques sur DM et les méthodes rapides
Nous avons questionné plusieurs laboratoires prestataires concernant la possibilité d’utiliser des méthodes de microbiologie rapides pour l’analyse des DM.
Ils sont tous unanimes pour dire que c’est toujours intéressant d’avoir un résultat microbiologique en quelques heures plutôt qu’en 7 jours (surtout lors des étapes de validation du bioburden).
Cependant, les analyses n’étant généralement pas libératoires (ou très rarement), le laboratoire est rarement sous pression pour fournir un résultat plus rapidement.
Nous souhaitons remercier Geoffrey Chaigne, Amélie Lamarque, Laura Marand et Philippe Chabeaud pour leurs témoignages.
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