Microbiologie alimentaire : Que vaut le ReadyStream pour la production d’EPT ?

Article “Super transparent”
Cela signifie qu’on a eu une liberté totale dans l’écriture de cet article (et ça c’est super cool)… On a cependant laissé un droit de réponse au fournisseur (encadrés bleus).

Lorsque Merck a sorti l’an dernier le système ReadyStream, cela nous a grandement intrigué.

Il faut dire que cela faisait bien longtemps qu’on n’avait pas eu une vraie nouveauté en ce qui concerne la production d’eau peptonée tamponnée.

On a donc pris notre mal en patience, laissé passer quelques mois et les premières installations. Puis en Juillet (2023) nous sommes partis à la pêche aux “retours d’expériences”.

On peut dire qu’on n’est pas rentré bredouille (ou plutôt “broc…” comme on dit dans le Bouchonois). En effet, nous avons pu échanger avec des laboratoires de microbiologie alimentaire provenant d’horizons très différents.

Voici la typologie des laboratoires que nous avons interrogé :

  • Laboratoires prestataires et des laboratoires internes
  • Laboratoires COFRAC et non COFRAC
  • Laboratoires qui utilisaient des poches prêtes à l’emploi
  • Laboratoires qui utilisaient des auto-préparateurs

Voici leurs retours d’expériences : 

Comment fonctionne le ReadyStream ?

Le ReadyStream est un appareil qui combine 2 savoir-faire de la société Merck : 

  • La stérilité (Millipore)
  • Les poudres de milieux de culture (GranuCult)

Ce système permet de reconstituer en quelques minutes 100 litres d’EPT stérile à la température souhaitée (T°C d’incubation).

Une poche contenant des granules d’EPT déshydraté est connectée au ReadyStream (fournie avec les filtres et les tuyaux).

Cette poche va dans un premier temps être réhydratée avec 10 litres d’eau stérile pour avoir une solution d’EPT dix fois concentrée.

Puis à chaque besoin du labo, cette EPT 10 fois concentrée sera de nouveau diluée avec de l’eau stérile (pré-chauffée) pour reconstituer de l’EPT 1 fois concentrée.

Voici une vidéo du fournisseur qui explique le principe du ReadyStream (c’est en anglais… mais les français devraient comprendre !) :

Les avantages de ReadyStream présentés par le fournisseur sont : 

  • Préparation de 100 litres d’EPT en moins de 15 minutes.
  • Solution prête à l’emploi (il suffit d’avoir une arrivée d’eau pure Milli-Q… ou équivalent).
  • Distribution d’EPT pré-chauffée.
  • Moins de manutention qu’avec des poches de 3 ou 5 litres d’EPT.
  • Durée de conservation de 5 jours une fois le milieu de culture réhydraté.

Allons maintenant vérifier ces arguments dans la vraie vie du labo.

La parole est aux microbiologistes !

Pourquoi les laboratoires ont-ils adopté le Readystream ?

Il faut distinguer 2 types d’utilisateurs : 

  • Les labos qui utilisaient des poches prêtes à l’emploi
  • Les labos qui utilisaient un autopréparateur

Nous avons échangé avec les deux.

Pour les utilisateurs de poches :

L’argument principal concerne la manutention des poches de 3 litres ou 5 litres, de la dépalettisation des boîtes de poches jusqu’au transfert dans le laboratoire. C’est lourd et ça n’est vraiment pas confortable pour les technicien.ne.s. surtout lorsque cela représente de 10 à 30 poches par jour. Cela se complique davantage lorsque les poches doivent être pré-chauffées : double manutention !

Pour les utilisateurs d’autopréparateurs

L’argument principal est la disponibilité du milieu. Avec un autopreparateur il faut attendre presque 2 heures avant de pouvoir utiliser le bouillon d’enrichissement. Avec le ReadyStream, au bout de 15 minutes, on peut lancer les premières analyses. Si lancer un autopreparateur le matin n’est généralement pas un problème, ce n’est pas le cas pour les analyses du début d’après-midi.

Connexion du ReadyStream avec un diluteur

Tous les labos que nous avons interrogés ont couplé leur ReadyStream avec un diluteur gravimétrique.

Peu importe la marque de celui-ci, aujourd’hui le ReadyStream ne communique directement avec aucun diluteur. Il faut donc passer par une bouteille intermédiaire qui fait le tampon entre le ReadyStream et le diluteur.

Set-up du ReadyStream dans un des laboratoires que nous avons interrogé.

Cette solution technique n’est pas encore idéale car il faut stériliser la bouteille et vérifier qu’il y ait toujours suffisamment de liquide dans celle-ci avant de lancer une dilution. Cependant c’est ce qui permet de rendre le ReadyStream compatible avec tous les diluteurs gravimétriques du marché.

Aucun des labos interrogés ne considère cela comme un problème… dès fois on se fait peut-être des nœuds au cerveau pour rien !

L’adoption du ReadyStream dans le laboratoire de microbiologie

Ahhh le changement des habitudes, c’est peut-être ce qu’il y a de plus compliqué dans un laboratoire de microbiologie.

Les responsables de laboratoires que nous avons interrogé ont laissé le choix à leurs équipes techniques de décider si le ReadyStream répondait à leurs attentes ou pas (ce qui est plutôt bien vu !).

Le système a donc été évalué pendant un certain temps et c’est les technicien.ne.s qui ont décidé en connaissance de cause de conserver le ReadyStream.

Après plusieurs mois d’utilisation, le ReadyStream semble toujours faire l’unanimité auprès des utilisateurs.trices. Cette affirmation est d’autant plus vraie pour les microbiologistes qui utilisaient des poches de bouillons d’enrichissement.

Il semblerait que la manutention des poches ne leur manque mais alors pas du tout !

Le maintien de la stérilité des milieux EPT

La plus grande peur du microbiologiste c’est la contamination d’un milieu de culture… c’est d’autant plus vrai quand il s’agit du bouillon d’enrichissement utilisé au tout début de l’analyse.

Pour le ReadyStream, le fournisseur indique que les poches peuvent être conservées jusqu’à 5 jours après la première utilisation. Les labos que nous avons interrogés utilisent pour certains 2 poches par jour (200 litres) et pour d’autres une poche tous les 4-5 jours.

Aucun d’entre eux n’a eu une seule contamination jusqu’à présent. Affaire à suivre …

Performance du milieux EPT

Dans leurs poches ReadyStream, Merck utilise sa poudre GranuCult EPT. Il s’agit-là de la meilleure qualité d’EPT de son catalogue.

Parmi les laboratoires interrogés, il y en a un qui a fait une étude sur le pouvoir tampon de l’EPT ReadyStream.

Ce labo analyse régulièrement des poudres de lait infantile, une matrice qui peut être acidifiante. Il est donc important pour lui que le bouillon puisse conserver un pH le plus neutre possible pour ne pas impacter la croissances des germes recherchés (Cronobacter et Salmonella). Lors de son étude, ce laboratoire a démontré que sur les poudres de lait le pH du bouillon ReadyStream était bien plus stable qu’avec son ancien bouillon d’enrichissement.

Les autres laboratoires interrogés on testé les performances du bouillon en suivant l’ISO 11133, aucun problème de fertilité ne nous a été signalé.

Droit de réponse Merck :
Merck a lancé une étude externe pour prouver qu’une simple concentration peut avoir la même efficacité qu’une double concentration chez certains fournisseurs. Cette performance proviendrait des granulés GranuCult si particulier chez Merck.

Et l’ISO 11133 dans tout ça ?

Alors ça c’est la question à 10 000 €… Qu’est-ce qu’un lot de ReadyStream ? Est-ce que chaque poche est un lot, ou est-ce que chaque lot de poches est un lot ?!

Sachant que certains laboratoires accrédités COFRAC ont justifié qu’un bouillon d’enrichissement préparé avec un autopréparateur n’était pas un lot, pourquoi cette justification ne fonctionnerait-elle pas pour le ReadyStream ?

C’est en tout cas dans ce sens que les laboratoires équipés du ReadyStream vont pousser.

Reste a bien maitriser la qualité de l’eau et les contrôles qualités internes (essais à blanc et Contrôles qualitatifs et quantitatifs)

Droit de réponse Merck :
Merck propose un dossier de validation « béton » pour aider les utilisateurs du ReadyStream (et les autorités) à considérer qu’un lot de poches ReadyStream = un lot

Utilisation de l’option “pré-chauffage” de l’EPT


Le ReadyStream peut préchauffer le bouillon d’enrichissement.

Cette option semble être très utile pour des matrices chocolatées, ou pour les “gros volumes” (375g). Cela permet de démarrer plus rapidement l’incubation à la bonne température.

Les laboratoires interrogés qui analyse que des petits volumes (25 g soit 225 ml d’EPT), n’utilisent pas systématiquement cette option de pré-chauffage.

Et le prix dans tout ça ?

Alors non, nous ne rentrerons pas dans les détails du prix, mais nous donnerons quelques éléments de comparaison… A vous la négociation !

Le prix par litre du ReadyStream est inférieur à celui des poches, mais supérieur à celui de la poudre (pour une utilisation avec un auto-préparateur).

Mais alors, comment se fait-il alors que plusieurs labos soient passés des préparateurs de milieux de culture au ReadyStream, nous direz-vous ?

Voici les différents arguments qui nous ont été avancé : 

  • « L’autopreparateur était en fin de vie » : Le coût d’un autoprep et des maintenances n’est pas neutre (le ReadyStream a un coût qui est largement inférieur à un autopréparateur).
  • La difficulté de trouver des technicien.ne.s pour la préparation des milieux : Un autoprep necessite un peu plus de manutention (nettoyages, pesées, etc…).
  • L’augmentation du prix de l’électricité : un auto-prep ça consomme beaucoup.
  • La consommation d’eau (pour refroidir le préparateur) : Cette fois-ci ce n’est pas une question de coût, mais pour l’image de “gâchis” que ça renvoie aux équipes… alors que la plupart de nos régions sont en alerte sécheresse.
  • L’attente de 2 heures pour que le milieu soit prêt.

Les limites du ReadyStream ?

Les laboratoires interrogés ont identifié une limite au ReadyStream, c’est la non-disponibilité du Fraser sous le format ReadyStream.

Droit de réponse de Merck :
Les équipes de R&D de Merck travaillent actuellement sur le sujet.

Conclusion

Les laboratoires équipés d’un ReadyStream avec lesquels nous avons échangé sont vraiment satisfaits de la solution proposée par Merck.

La perception des avantages de la technologie vont dépendre des solutions utilisées auparavant dans le laboratoire :

  • Pour les utilisateurs de poches l’argument principal est la fin des manutentions lourdes et répétées des poches (3 et 5 litres).
  • Pour les utilisateurs de préparateurs, le point fort est la disponibilité du milieu en 15 minutes, contre presque 2 heures pour les autoprep.



La solution ReadyStream est encore jeune, on peut donc s’attendre à voir quelques améliorations dans les prochains mois; Comme une connexion directe avec les diluteurs gravimétriques (sans passer par la bouteille intermédiaire) et la disponibilité d’autres milieux comme le Fraser.

Si vous avez des questions concernant le ReadyStream, n’hésitez pas à les poser directement en commentaire ou contactez un.e spécialiste Merck.

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2 réponses
  1. Anonyme
    Anonyme dit :

    Bonjour, reconstitution en quelques minutes de 100L d’EPT n’est pas tout a fait juste car ca prend plus de 20min pour avoir les 10L d’EPT 10X….
    Le système ne faisant pas de mélange, comment est assurée l’homogénéisation de l’EPT et sa dissolution complète? a part a la main?
    Question d’où vient l’eau stérile et l’eau stérile préchauffée? cela nécessite donc un ou plusieurs équipements additionnels avec métrologie et verif…. Avez vous tenu compte de cela dans le coût total?

    Répondre
    • pierre
      pierre dit :

      Bonjour SuperMicrobiologiste Anonyme,

      C’est des très bonnes questions que vous avez là, cela va nous permettre de clarifier certains points.

      Il faut en effet 15 minutes pour préparer les 10 litres d’EPT 10 fois concentrés. Au bout des 15 minutes le ReadyStream est prêt à délivrer l’EPT pour les premières analyses. Ensuite, au fur à mesure des dilutions (et donc des besoins) le ReadyStream va continuer à produire jusqu’à 100 litres d’EPT.

      Vous avez raison, le système ne mélange pas. Il faut donc homogénéiser la poche à la main lors de l’étape de dissolution. Cela fait partie des 15 minutes de préparation. Les retours que nous avons eu concernant cette étape sont bons, apparemment les Granucults sont très faciles à dissoudre. Mais c’est un bon point que vous relevez là (et qui manque dans notre article) une dissolution compliquée aurait ajouté une étape laborieuse au processus.

      Pour ce qui est de l’eau, il faut connecter le ReadyStream sur un système type Milli-Q (ou l’équivalent d’une autre marque). La stérilité est assurée par des filtres présents sur la poche.

      En ce qui concerne le chauffage, c’est le ReadyStream qui s’en occupe directement, donc pas besoin d’équipement additionnel.

      On espère avoir répondu le plus clairement possible à vos questions, si ce n’est pas le cas, vous savez où nous trouver !

      Répondre

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