Impact de l’étalement au râteau sur le dénombrement des microorganismes

“Personne n’aime prendre un râteau sauf peut-être les… microbiologistes !”

Don Juan



Qu’on le nomme râteau, étaleur, spatule, le truc en L pour étaler ou le râteau de Drigalski (le débat est encore ouvert sur LinkedIn), l’utilisation de cet instrument doit être maitrisé à la perfection !

Une utilisation trop intensive et on risque de perdre tuer des microorganismes, une utilisation trop “laxiste” et le dénombrement sera impossible !

Bref ratisser n’est pas une action anodine.

Pour le moment “râteau” est en tête des suffrages

Qu’est-ce que le râteau de Drigalski ?

La spatule de Drigalski fut inventé par… Wilhelm von Drigalski (un bactériologiste allemand). A l’origine, les spatules étaient composées en verre ou en métal. Elles étaient constituées d’un manche et d’une partie en forme de triangle (en contact avec la gélose).

Aujourd’hui les râteaux ont plutôt une forme de L et sont fabriqués en plastique. Certains laboratoires de microbiologie les fabriquent eux-mêmes en chauffant une pipette Pasteur… et oui les microbiologistes peuvent aussi être de formidables sculpteurs sur verre.

On a tous déjà fait ça en TP de microbiologie… mais ça finissait souvent en grand n’importe quoi !

Au final, peu importe la forme ou le nom, l’utilisation reste la même.

Le râteau est un outil utilisé par les microbiologistes non pas pour jardiner (quoique) mais pour étaler une solution de microorganismes à la surface d’une gélose. Lors de l’étalement le liquide pénètre dans la gélose ce qui permet une répartition homogène des microorganismes. Cette manipulation permet de faciliter l’énumération des microorganismes.

Parce que oui l’objectif principal du râteau est de pouvoir compter les microorganismes présent dans l’échantillon de départ.

Attention à la durée de l’étalement

Une étude mené par Hedderich et al* a montré que la durée de l’étalement pouvait avoir une incidence sur la viabilité de certaines souches, notamment celle des bactéries à Gram négatifs.

Ratisser OUI, mais pas trop longtemps !

On remarque qu’on perd 50 % des bactéries à Gram négatif (Escherichia coli et Pseudomonas aeruginosa) après 10 secondes d’étalement et 80% après 20 secondes. Ça chamboule, non ?!

Les chercheurs ont ensuite observé l’état des microorganismes avec un microscope électronique

A gauche E.coli avant étalement au râteau. A droite E.coli après après un étalement de 15s.
A gauche S.aureus avant étalement au râteau. A droite S.aureus après après un étalement de 15s.

Les observations au microscope électronique montre bien que l’étalement au râteau endommagent fortement les membranes des bactéries à Gram négatif. Par contre cette même manipulation n’a pas le même effet sur la membrane des bactérie à Gram positif.

Conclusion

“Que ça soit pour les tests de fertilité ou pour les analyses d’énumération de routine, il faut y aller mollo sur le râteau.”

En plus de challenger les milieux de culture, les tests de fertilité peuvent permettent de se rendre compte d’un problème de manipulation au niveau du laboratoire de microbiologie… et dans notre cas particulier d’un problème d’étalement au râteau.

Si lors de vos tests de fertilité vous avez régulièrement des problèmes de recouvrement pour vos bactéries à Gram négatif c’est peut-être à cause de la durée de l’étalement. Après investigation, si l’étalement est effectivement en cause, il faudra revoir les procédures internes pour standardiser cette étape en la limitant à 5 secondes ou à 5 “coups de râteau par exemple.

Mais le plus important reste d’en discuter avec vos collègues microbiologistes pour connaitre leurs pratiques et éventuellement les alerter sur cette problématique encore peu connue.

* Hedderich, R., Müller, R., Greulich, Y., Bannert, N., Holland, G., Kaiser, P., Reissbrodt, R. Mechanical damage to Gram-negative bacteria by surface plating with the Drigalski-spatula technique
(2011) International Journal of Food Microbiology, 146 (1), pp. 105-107.

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