Pharma non stérile: Comment faire les tests de fertilité des milieux de culture ?
Pour savoir comment se passent concrètement les tests de fertilité des milieux de culture chez un pharma non stérile, nous avons contacté Alexandra Foucher.
Alexandra est agent de maîtrise en microbiologie depuis plus de 20 ans dans l’industrie pharma, des tests de fertilité elle en a fait des milliers… non en fait c’est TNTC !!
Nous l’avons donc interviewé pour connaître ses secrets.
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Introduction aux tests de fertilité dans le labo de microbiologie
Alexandra, pouvez-vous nous présenter le laboratoire de microbiologie dans lequel vous travaillez ?
Je suis microbiologiste dans un laboratoire qui produit des produits pharmaceutiques non stériles. On fabrique des formes sèches (comprimés, gélules) et des formes liquides (sirops, collutoire).
Quels types de milieux de culture utilisez-vous au laboratoire de contrôle qualité ?
Nous utilisons 2 types de milieux de culture :
Des flacons à couler pour les contrôles des microorganismes spécifiés. On a des géloses Cétrimide, VRBG, Mac Conkey et XLD.
Des géloses prêtes à l’emploi, déjà coulées. On les utilise essentiellement pour les contrôles environnementaux (boîtes de sédimentation 90mm et boîtes contact). Pour ces géloses on utilise du TSA et du Sabouraud. On commande également les géloses pré-coulées Chapman.
A quelle fréquence effectuez-vous des contrôles de fertilité ?
On fait des tests de fertilité pour chaque lot et à chaque réception. Ce qui représente environ 120 tests fertilités par an pour mon laboratoire. C’est beaucoup, mais malheureusement nos zones de stockage sont limitées et pour certaines références les DLU nous imposent des commandes fréquentes.
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Exécution et interprétation des tests de fertilité
Comment préparez-vous les souches utilisées pour les tests de fertilité ?
On utilise les 7 souches de la Pharmacopée Européenne (A.brasiliensis, B.subtilis, C.albicans, P.aeruginosa, S.aureus, E.coli, S.abony).
Pour simplifier les manipulations au sein du laboratoire de microbiologie, on commande des souches prêtes à l’emploi, les Bioball de chez bioMérieux. Ces souches sont déjà calibrées à la bonne concentration pour nos tests de fertilité (<100 cfu).
Faites-vous des fertilités avec des souches environnementales ?
Pour le moment non… mais je dois vous avouer que c’est un sujet que nous suivons de près !
Concrètement comment se passent les tests de fertilité ?
Pour les géloses qui vont être utilisées pour le dénombrement, on dépose 100uL de solution de souche calibrée (environ 55 cfu) sur la gélose du nouveau lot et sur une gélose d’un ancien lot validé. On ne fait pas de duplica.
Pour les géloses utilisées en détection on ne teste que le nouveau lot.
Combien de temps incubez-vous vos géloses avant de lire les résultats de fertilité ?
On suit les temps d’incubation recommandés par la Pharmacopée Européenne (Chapitres : 2.6.12 et 2.6.13 )
Par exemple, pour Mac Conkey on doit faire une lecture en moins de 18h et pour Cétrimide on va lire Pseudomonas aeruginosa en moins de 18h et Staphylococcus aureus (pour la sélectivité) en plus de 72h.
Cela signifie que si nous avons 30 colonies sur notre gélose de contrôle, nous devons avoir entre 15 et 60 colonies sur le nouveau lot pour pouvoir le libérer.
Passons aux résultats, quels critères utilisez-vous pour considérer que vos nouveaux lots de géloses sont fertiles ?
Pour les géloses utilisées en dénombrement, le résultat du lot à tester ne doit pas différer de plus d’un facteur 2 par rapport à l’inoculum. Cela signifie que si on a 30 colonies sur notre gélose TSA de contrôle (ancien lot déjà validé), on doit avoir entre 15 et 60 sur le nouveau lot pour qu’il puisse être libéré.
Pour les géloses utilisées en détection on va faire une observation visuelle des colonies et on va les comparer avec des photos que nous avons dans nos SOP. On va se focaliser sur la croissance, l’aspect et les réactions indicatives. Si l’aspect qualitatif est conforme, on libère le lot de géloses pour une utilisation en routine.
Quel conseil pourriez-vous donner aux microbiologistes qui font des tests de fertilité de milieux de culture ?
Certaines souches sont plus capricieuses que d’autres… comme Pseudomonas !
Ça me rappelle une anecdote. Dans notre laboratoire on utilise des pipettes Pasteur qu’on fond pour faire des râteaux d’étalement. On s’est rendu compte que si on ne faisait pas un double coude avec des angles à 90° on avait de fortes pertes pour le Pseudomonas (qui est très sensible à l’étalement). On a donc modifié notre façon de faire et depuis tout se passe bien. Si on les chouchoute bien, elles nous le rendent bien 😉
Merci beaucoup Alexandra pour toutes ces informations.
A la lecture de cet article, si vous avez des objections ou des questions complémentaires, venez alimenter le débat en laissant un commentaire ci-dessous.
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Pour quelles raisons pseudomonas est il plus sensible a l’étape d’étalement que d’autres bactéries ? Et en quoi la technique du double coude permet elle une meilleure récupération ? Merci pour vos éclaircissements !
Bonjour,
Très bonne question ! En fait les bactéries à Gram négatif sont très sensibles à l’étalement au râteau. Une étude montre qu’on peut perdre jusqu’à 80% des bactéries pour un étalement de 20 secondes. Cette étape endommage fortement les membranes de ces bactéries… Pseudo y étant particulièrement sensible !
Nous avons écris un article au sujet de cette étude : https://supermicrobiologistes.fr/impact-etalement-rateau-denombrement-microorganismes/
En ce qui concerne le double coude nous n’avons pas d’étude sur le sujet, juste le témoignage d’une microbiologiste aguerrie. On remarque également que les râteaux en plastique à usage unique on un deuxième coude.